Soutien scolaire SVT, BenDans ce cours de soutien scolaire SVT niveau lycée (terminale), notre E-prof en ligne Benoît se penche sur Toumaï, un homme apparu bien avant l’invention du smartphone.

Découvert en 2001 au Tchad, Toumaï serait le représentant d’une espèce baptisée Sahelantropus tchadensis, suspectée d’être très proche du DAC (dernier ancêtre commun) de l’Homme et du Chimpanzé. Autrement dit, l’une des premières espèces de la lignée humaine.

L’étude de la lignée humaine, petite partie du programme de TS, est l’occasion de montrer, qu’en sciences, les connaissances peuvent évoluer au grès des expérimentations et des découvertes (comme Toumaï) mais aussi, malheureusement, au gré des Hommes.

Toumaï

Avant d’aller plus loin, mettons en place quelques éléments de réflexion indispensables à la compréhension du problème qui entoure notre ami Toumaï.

Qu’est-ce que la lignée humaine ?

Comment peut-on savoir si un fossile appartient à cette lignée ou à une autre ?

Qu’est-ce que vient faire le Chimpanzé dans cette histoire ?

Les Chimpanzés (représentés actuellement par deux espèces Pan troglodytes et Pan paniscus plus connu sous le nom de bonobo) sont les espèces les plus proches de l’Homme comme en témoigne cette illustration :

Bonobo, Homme et Chimpanzé commun

Bonobo à gauche, Homme au centre et Chimpanzé commun à droite.

En phylogénie (littéralement la science des phylums, c’est à des dire des lignées), autrement dit en classification du vivant, on considère que deux espèces sont d’autant plus proches qu’elles partagent un grand nombre de caractères évolués (on dit aussi dérivés) en commun. Ces liens de parenté prennent ensuite la forme d’un arbre de parenté (appelé arbre phylogénétique ou cladogramme) où la proximité entre deux espèces se traduira par la présence d’un ancêtre commun récent.

Cladogramme des Primates

 

Cladogramme des Primates

Ainsi, à partir de la comparaison des espèces actuelles, ce type de représentation permet :

  • De définir des groupes (par exemple tout être vivant possédant des ongles et un pouce opposable sera un Primate).
  • De reconstituer l’histoire évolutive d’un groupe (par exemple, le nez est apparu avant que la queue ne disparaisse).
  • De déterminer les liens de parenté entre espèces (ici, l’Homme est étrangement plus proche du Gibbon que du Chimpanzé).
  • De reconstituer le portrait-robot des ancêtres communs.

Plus le nombre de caractères comparés sera grand et plus l’arbre sera fiable. Ainsi tout caractère peut être utilisé (caractères morphologiques, anatomiques, physiologiques, comportementaux ou encore moléculaires) tant que l’on compare ce qui est comparable : par exemple on comparera les séquences polypeptidiques d’une hémoglobine humaine avec une hémoglobine de Chimpanzé mais sans doute pas une hémoglobine humaine avec une insuline.

On voit sur l’arbre présenté plus haut, que plus de deux branches s’articulent sur un même ancêtre commun (représentés par des carrés), ce qui est le cas pour l’Homme, le Gibbon et l’Orang-Outan ; cela signifie que l’on ne sait pas duquel de ces deux primates l’Homme est ici le plus proche.

C’est en faisant appel à la comparaison de nombreux caractères moléculaires (caryotypes, gènes, protéines, etc) que l’on aboutit à l’arbre suivant :

Cladogramme des Primates

On y voit bien le dernier ancêtre commun (DAC) daté de 6 à 7 millions d’années.

Définition de la lignée humaine

On peut donc définir la lignée humaine comme étant l’ensemble des espèces situées entre nous et le DAC :

définition de la lignée humaine

Et les fossiles dans tout ça ?

Les fossiles sont traités comme les espèces actuelles et ne sont en aucun cas à considérer comme des ancêtres des espèces actuelles ! Car nous ne serons jamais certains que tel ou tel fossile est réellement un ancêtre. Tout au plus pourra-t-on dire que ce fossile est très proche de l’ancêtre.

Pour savoir si un fossile appartient à notre lignée où à celle du Chimpanzé, on doit lui trouver des caractères dérivés propres à notre lignée.

Si on compare l’Homme et le Chimpanzé (mais aussi l’Homme et le Gorille par exemple) on peut dire que :

  • Les points communs représentent les caractères primitifs spécifiques du DAC.
  • Les différences représentent les caractères dérivés de l’une ou l’autre des lignées.

En simplifiant, un fossile appartiendra à notre lignée s’il présente au moins un des caractères dérivés liés à :

  • L’acquisition de la bipédie même partielle (membres antérieurs plus courts que les membres postérieurs, bassin plus large que haut, colonne vertébrale à 4 courbures plutôt qu’une seule, trou occipital centré sous le crâne plutôt qu’en arrière, fémurs orientés vers l’intérieur et non parallèles etc.)
  • Une morphologie crânienne en relation avec une grande capacité cérébrale (témoignant d’autre part de l’usage d’outils) et la disparition du prognathisme (la face s’aplatit de plus en plus).

évolutions de l'hommeOn connaît de nombreux fossiles rattachés à notre lignée (à tort ou à raison) ; le document suivant (tiré de cet excellent site de SVT) en présente une jolie synthèse (à retrouver dans géologie et évolution sur le site pour de plus amples informations sur chaque fossile):

Il s’agit là de l’un de mes documents préférés car il présente pas moins de 26 points d’interrogation montrant bien que l’on ne sait rien des liens de filiations entre ces différents fossiles. On voit néanmoins que plusieurs membres de la lignée humaine ont vécu en de mêmes endroits au même moment d’où l’idée que notre évolution ne fut pas linéaire comme on l’a longtemps pensé mais buissonnante.

évolution buissonnante de la lignée humaine

Maintenant que vous disposez d’un petit aperçu de notre vision actuelle de la lignée humaine, revenons-en à Toumaï que vous pouvez apercevoir près du DAC dans les deux derniers documents.

Toumaï semble présenter de nombreux caractères intermédiaires entre les deux lignées ce qui en fait un bon candidat pour être le DAC sans que l’on en soit, pour autant, jamais certains :

exercice de bac sur la lignée humaine

Il fut d’ailleurs à la base de cet exercice du bac

Sa découverte est due à une petite équipe menée par Michel Brunet, paléoanthropologue français, enseignant-chercheur et directeur du département de géobiologie, géochronologie et paléontologie humaine à l’université de Poitiers de 1989 à 2007 (rappel : Toumaï est découvert en 2001) ; il devient  professeur au Collège de France fin 2007,  titulaire de la chaire de paléontologie humaine qu’il occupe jusqu’en 2011.

Selon son découvreur, Toumaï est bipède donc à rattacher à notre lignée. Ces travaux (entourés de prestige dès lors que l’on s’intéresse à nos origines) lui valurent probablement en grande partie sa titularisation au collège de France.

Sauf que…

Toumaï n’était peut-être pas aussi bipède que cela comme pourrait en témoigner son fémur trouvé sur place en même temps que le crâne (cf image ci-dessous) mais, semble-t-il, ignoré pendant 17 ans, par Michel Brunet.

crâne et fémur de Tournaï

fémur de TournaïPourquoi ? Comment ? Je vous renvoie à cet article récent du Monde qui vous relatera ces faits bien mieux que je ne saurais le faire :

Pour conclure, en sciences comme ailleurs, nous devons rester attentifs à la façon dont est bâtie notre vision du monde et de son histoire, vision qui ne peut qu’évoluer au cours du temps, espérons le, sur de bonnes bases !

Comme toute autre vérité, la vérité scientifique, qui devrait être la plus indiscutable, est malheureusement soumise aux désirs et aux enjeux de notoriété et de pouvoir qui règnent aussi… dans la communauté scientifique !

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