Révise ton bac littéraire français avec ta e-prof de soutien scolaire en ligne ! Retrouve notre analyse complète du texte Hernani de Victor Hugo.

Chaque type de texte requiert pour son analyse une attention spécifique. Je vous propose donc dans cet article de nous pencher sur le texte théâtral en nous appuyant tout particulièrement sur Hernani de Victor Hugo, au programme du bac 2019 de Littérature en Terminal L.

1/ Le vocabulaire du théâtre

Le genre théâtral, comme tous les genres littéraires, a son vocabulaire propre. Il est nécessaire de le connaître afin d’utiliser les termes appropriés lors de l’analyse d’une pièce ou d’un extrait. Voici donc les termes principaux à connaitre :

  • Une réplique :

Chaque dialogue théâtral se compose de répliques qui correspondent au texte/discours des personnages répondant à d’autres personnages. Exemple : acte II scène 1, vers 418 et suivants :

DON SANCHO

Seigneur, reparlons de ce traître.

Et vous l’avez laissé partir !

DON CARLOS

Comme tu dis.

DON MATIAS

Et peut-être c’était le major des bandits !

DON CARLOS

Qu’il en soit le major ou bien le capitaine,

Jamais roi couronné n’eut mine plus hautaine.

  • La tirade :

Lorsqu’une réplique est particulièrement longue, on parle alors de tirade. Elle étoffe le discours des personnages par une succession de phrases plus complexes, de questionnements et d’arguments. Par exemple, dans l’acte III, scène 1 de Hernani, don Ruy Gomez enchaîne de nombreuses tirades en parlant avec doňa Sol, sur le thème de l’amour et de la vieillesse.

  • Le monologue :

Il s’agit d’un discours de l’un des personnages qui n’est adressé à aucun autre personnage, soit qu’il est seul sur scène ou qu’il se fasse en aparté (voir ci-dessous). Le monologue est une convention théâtrale (parfois critiquée car jugée artificielle) qui permet d’éclaircir une situation ainsi que de traduire les sentiments et émotions profonds d’un personnage. Exemple : le monologue de Hernani à l’acte I, scène 4 qui précise son désir de vengeance envers don Carlos (« Nuit et jour, en effet, pas à pas, je te suis. / Un poignard à la main, l’œil fixé sur ta trace, / Je vais. […] / Ce que je veux de toi, ce n’est point faveurs vaines, / C’est l’âme de ton corps, c’est le sang de tes veines / C’est tout ce qu’un poignard, furieux et vainqueur, / En y fouillant longtemps peut prendre au fond d’un cœur. »)

  • L’aparté :

Il s’agit d’une réplique dont le véritable destinataire est le spectateur. Le personnage feint de se parler à lui-même, mais s’adresse en réalité au public qui devient alors son complice ce qui crée un effet de décalage. Exemple (acte III, scène 2, vers 835) : « HERNANI, (à part) Qu’on y vienne !»

  • Les didascalies :

Elle renvoie à toutes les précisions et informations concernant les lieux, les costumes, les décors, les intonations ou sentiments des personnages, les bruits…, qui ne relèvent pas du discours même des personnages.

  • La stichomythie :

Il s’agit d’un échange entre personnages qui se caractérise par des tirades très brèves et souvent assez vives, et qui met en évidence l’intensité tragique ou comique de la scène. Exemple : acte V, scène 3, vers 1991 à 2009.

analyse Hernani Victor Hugo

2/ L’importance de la scène d’exposition

La scène d’exposition est le tout premier moment de l’action théâtrale dans une pièce. Elle revêt une grande importance dans l’analyse et la compréhension du texte. Il est donc fondamental de savoir identifier les enjeux de cette scène.

Dans notre blog de soutien scolaire en ligne retrouve également notre article sur Les batailles d’Hernani

La scène d’exposition est en effet celle qui va donner toutes les informations nécessaires au spectateur pour comprendre ce qui va suivre. Comme son nom l’indique, elle expose, dès la première scène de la pièce – et dans la tragédie classique, durant tout le premier acte généralement –, les éléments essentiels de l’action. Contrairement au roman où le narrateur peut dès l’incipit – qui est donc le pendant romanesque de la scène d’exposition – retranscrire au lecteur le cadre dans lequel va se dérouler l’histoire (époque, personnages, lieu…), au théâtre, tout se transmet par l’oralité et le visuel. Il faut en effet ne jamais omettre qu’une pièce de théâtre est d’abord faite pour être jouée devant des spectateurs. Le lieu dans lequel elle va se dérouler, l’époque, les personnages, l’intrigue : tout va donc être ou exprimé oralement par un personnage, ou être signifié par les décors et costumes. À savoir aussi que la scène d’exposition a pour but d’attirer l’attention du spectateur, de lui donner envie de voir le reste de la pièce. Elle se doit donc de plaire en étant dynamique et susciter la curiosité. C’est pour cela que de nombreuses pièces débutent in medias res c’est-à-dire, en pleine action : l’histoire s’ouvre sur une action qui a déjà commencé et plonge le spectateur immédiatement au cœur de l’intrigue.

La scène d’exposition renseigne le spectateur sur :

  • Les personnages: qui sont-ils ? Quels-sont leurs liens? De quel milieu socioculturel sont-ils issus ? etc.
  • L’action/l’intrigue de la pièce : le problème principal est exposé. Les événements récents sont explicités et des indices sur la crise à venir sont suggérés.
  • Le ou les lieux dans lesquels la pièce va se dérouler.
  • Le genre : les premiers échanges entre personnages donnent le ton de la pièce et renseignent donc le spectateur sur le genre auquel se rattache la pièce.

La scène d’exposition dans Hernani de Victor Hugo :

Il s’agit d’une scène d’exposition qui démarre in medias res puisque le spectateur va rapidement comprendre que les liens entre les personnages, et notamment les sentiments amoureux, sont déjà engagés: doňa Josefa, la suivante de doňa Sol de Silva, s’affaire dans une chambre lorsque quelqu’un frappe. Sa première réplique « Serait-ce déjà lui ? » informe de suite le spectateur qu’elle attend quelqu’un, un homme se nommant Hernani : « Quoi, seigneur Hernani, ce n’est pas vous ! » (Acte I, scène 1, vers 3). L’homme qui pénètre alors informe le spectateur sur la situation et de fait, sur de nombreux enjeux qui vont se jouer plus tard (acte I, scène 1, vers 5 à 10) :

Suis-je chez doňa Sol ? Fiancée au vieux duc

De Pastraňa , son oncle, un bon seigneur, caduc,

Vénérable et jaloux ? dites ? La belle adore

Un cavalier sans barbe et sans moustache encore,

Et reçoit tous les soirs, malgré les envieux,

Le jeune amant sans barbe à la barbe du vieux. 

Le spectateur comprend également quel rôle tient la femme sur qui s’ouvre la pièce puisque l’homme qui est entré l’appelle « duègne » ce qui renvoie aux femmes âgées, en Espagne, qui avaient pour charge de veiller sur la bonne conduite de jeunes femmes. Lorsque dans la scène 2 entre une jeune femme que doňa Josefa appelle « Madame », le public est donc informé qu’il s’agit de doňa Sol.

Marion soutien scolaire françaisLa deuxième scène délivre une autre information capitale au public puisque Hernani, qui a alors rejoint sa maîtresse, expose l’objet de sa vengeance (vers 88 à 102) : il souhaite en effet venger son père mort sur l’échafaud après avoir été condamné par le père de don Carlos, actuel roi d’Espagne (celui-là même qui est alors caché dans une armoire et qui assiste secrètement à la rencontre entre Hernani et dona Sol). On ne découvre cependant qu’à la scène 3 l’identité de l’homme caché dans l’armoire : « Il jette son manteau, et découvre son visage caché par son chapeau. » Puis, Hernani : « Le roi d’Espagne ! » (acte 1, scène 3, vers 280). Durant cette troisième scène, un autre enjeu de la pièce est délivré au public : L’Empereur vient de mourir et don Carlos a pour projet de lui succéder.

Ainsi, durant cette scène d’exposition, les quatre principaux personnages sont présentés :

  • doňa Sol ;
  • don Ruy Gomez son oncle et à qui elle est promise (celui-ci fait son entrée à la scène 3) ;
  • son amant Hernani qui est aussi un bandit ;
  • le roi d’Espagne, don Carlos.

Les problèmes principaux qui vont créer l’intrigue de la pièce sont aussi exposés clairement :

–        la triple intrigue amoureuse (don Carlos et Hernani aiment tous les deux doňa Sol qui est promise à son oncle don Ruy Gomez). Doňa Sol quant à elle est éprise de Hernani qu’elle est prête à suivre) ;

–        les intrigues politiques (la vengeance de Hernani  et la succession de l’empereur).

Quant au lieu, les décors et costumes suggèrent de suite que la scène se déroule dans les appartements d’une femme issue de la noblesse. Le lecteur est averti grâce aux didascalies que l’action se joue en Espagne, à Saragosse et l’information est donnée au spectateur averti dès le vers 6 de la scène 1 lorsque don Carlos évoque le duc de Pastraňa qui est une ville de la province de Guadalupe en Espagne.

Enfin, de par le ton des personnages (très empreint de lyrisme) et les enjeux graves évoqués dans les scènes, on comprend qu’il s’agit d’une tragédie. Cependant, on relève aussi de nombreux éléments qui relèvent davantage de la comédie, voire même du vaudeville : le roi qui se cache dans l’armoire, la duègne qui joue les entremetteuses, l’ironie et les moqueries de don Carlos, les gestes et mimiques indiqués par les didascalies… Victor Hugo rompt ainsi avec la tragédie classique.

3/ L’action dramatique

Dans une approche théâtrale classique, l’action dramatique est l’ensemble des faits et actions qui constituent le sujet et le nœud de la pièce ; il s’agit de la façon dont s’imbriquent les événements ainsi que les personnages, et qui permet de faire progresser l’intrigue. Elle se déploie de manière classique durant quatre moments :

  • La scène d’exposition que nous venons d’observer ;
  • Le nœud même de l’intrigue qui correspond au moment où le conflit se noue : il s’agit de conflits qui empêchent la progression de l’action ainsi que des différents obstacles qui se mettent au travers du chemin des personnages. Cette période de l’action dramatique s’étend généralement sur les actes II et III de la pièce.
  • Les péripéties soit un retournement de l’action : c’est le moment où le nœud de l’intrigue et le dénouement de celle-ci s’organisent. Un événement nouveau va permettre de trouver une solution au conflit. Ce moment s’articule durant l’acte IV. Cependant, de manière plus générale, une péripétie correspond aussi à tout événement qui survient dans l’action et qui provoque des bouleversements et ce, à n’importe quel moment de l’action dramatique. Il faut donc opérer une différence entre la péripétie qui renvoie à un moment précis de l’action dramatique – soit un moment fort de l’articulation de l’intrigue –, et la péripétie comme événement importun participant au rythme de la pièce et qui se rencontre notamment souvent dans les comédies.
  • Le dénouement qui a lieu à l’acte V et qui découle naturellement de la péripétie puisqu’il correspond à la résolution définitive du conflit.

L’action dramatique dans Hernani :

Après la scène d’exposition qui occupe tout l’acte I et qui s’intitule Le Roi, le nœud de l’intrigue se joue pleinement à l’acte III (Le Vieillard). L’acte II (Le Bandit) quant à lui permet d’assoir la rivalité entre Hernani et don Carlos. En effet, bien qu’ayant déjà rencontré Hernani au premier acte, don Carlos ne découvre son identité complète que durant ce deuxième acte (acte II, scène 3, vers 585 à 586) :

HERNANI

Seigneur, qu’il te souvienne

Qu’hier encore ta dague a rencontré la mienne.

DON CARLOS

Je le pouvais hier. J’ignorais votre nom,

Vous ignoriez mon titre. Aujourd’hui, compagnon,

Vous savez qui je suis et je sais qui vous êtes.

L’acte II dessine donc plus clairement les contours des relations entre Don Carlos, Hernani et doňa Sol. Le nœud dramatique autour duquel va se fixer l’intrigue est repoussé à l’acte III : quelques semaines se sont écoulées et le jour des noces entre doňa Sol et son oncle arrivent bientôt. Hernani, dont la rumeur de sa mort est annoncée[1], se présente au château de don Ruy Gomez déguisé en pèlerin. Or, lorsque Hernani aperçoit sa maîtresse en tenue de mariée, il dévoile sa véritable identité : « Je suis Hernani ! » (scène 3, vers 857). Mais bien que sa tête soit mise à prix, le duc l’a accueilli comme son hôte et les lois de l’hospitalité le contraignent à le protéger et le cacher. Il soustrait donc le bandit à Don Carlos qui pénètre dans le château. Puisque ce dernier ne peut capturer Hernani, il décide d’enlever doňa Sol : c’est ici que se joue une grande partie de la pièce. En effet, puisque doňa Sol a été enlevée par Don Carlos qui a l’espoir de l’épouser, les deux autres prétendants scellent un pacte : celui de s’unir pour assassiner le futur empereur. En échange, puisque Don Ruy Gomez a laissé la vie sauve à Hernani, ce dernier s’engage à se suicider dès qu’il entendra le son du cor du duc (scène 7, ver 1292 à 1296) :

HERNANI

Écoute. Prends ce cor. – Quoi qu’il puisse advenir,

Quand tu voudras, seigneur, quel que soit le lieu, l’heure,

S’il te passe à l’esprit qu’il est temps que je meure,

Viens, sonne de ce cor, et ne prends d’autres soins.

Tout sera fait !

Ce pacte crée une tension dramatique importante sur laquelle repose tout le reste de la pièce jusqu’au dénouement.

Hernani Victor HugoL’acte IV, Le Tombeau, amène la péripétie qui va permettre le dénouement de la pièce. L’action se déroule deux mois plus tard, à Aix-la-Chapelle, lors des élections du futur empereur qui réunit notamment tous les conjurés contre don Carlos dont Hernani et don Ruy Gomez. Or, contrairement à toute attente, lorsque don Carlos est élu empereur et désirant être à la hauteur de la nouvelle fonction qui lui incombe, il fait preuve de clémence envers tous ses conspirateurs et autorise le mariage entre Hernani et doňa Sol (scène 4, vers 1757) : « DON CARLOS, la [doňa Sol] montrant à Hernani : Duc, voilà ton épouse ».

Enfin survient le dénouement de la pièce à l’acte V (La Noce): après toutes ces aventures, doňa Sol et Hernani se marient. Mais le soir même de leurs noces, le cor de don Ruy Gomez retentit. Hernani, qui tente de dissimuler la situation à sa nouvelle épouse, n’a cependant d’autre choix que d’obéir. Doňa Sol qui ne parvient pas à obtenir la pitié de son oncle, s’empoisonne alors en laissant l’autre moitié de la fiole de poison à Hernani qui boit à son tour. Après la mort des deux amants et frappé par l’horreur de son geste, don Ruy Gomez se suicide à son tour.

[1] Acte III, scène 1, vers 808 à 812.

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